Lorsqu’on entend parler des alcidés de Bretagne, ces pingouins et autres macareux, c’est malheureusement souvent lors de tempêtes ou de pollutions aux hydrocarbures. On fait état des échouages massifs de ces oiseaux alors épuisés (ou morts). Et si on parlait de quelque chose de plus joyeux ? La période de reproduction de ces oiseaux par exemple !

Qui sont les alcidés de Bretagne ?

La famille des alcidés regroupe une vingtaine d’espèces dans le monde, dont trois sont particulièrement faciles d’observation sur nos côtes : le guillemot de Troïl, le pingouin torda et le macareux moine.
C’est à partir du vieux norois (dialecte à l’origine des langues scandinaves actuelles) que Carl von Linné a baptisé cette famille. Il employait le terme « álka » qui servait à désigner les pingouins de l’Arctique (Source : La mystérieuse histoire des noms d’oiseaux, Henriette Walter et Pierre Avenas, Robert Laffont, 2022). Les pingouins, à la différence des manchots qu’on rencontre dans l’hémisphère sud, sont capables de voler.
Ces oiseaux pélagiques ne posent pattes palmées à terre que lors de la période de reproduction où ils nichent en colonies sur des falaises. Chaque couple pond un œuf unique qui est couvé par les deux parents pendant environ un mois. La ponte à généralement lieu entre mai et juin. Le jeune est aussi nourri par le couple durant plus ou moins un mois avant de quitter le nid (Source : Les oiseaux d’Europe, Delachaux et Niestlé, 1987).

Les premiers alcidés de Bretagne sont...

Les alcidés de Bretagne : guillemot de Troïl
Guillemot de Troïl ©️ Morgane Cazes
Les premiers sur la ligne d’arrivée des côtes bretonnes sont les guillemots de Troïl (Uria aalge). Ils se montrent dès les mois d’octobre ou novembre dans nos eaux côtières.
Ce « petit Guillaume » (c’est de là que vient son nom vernaculaire) choisit de faire son nid sur une vire, petite plateforme rocheuse dans la falaise. Et quand on parle de faire un nid, on veut dire qu’il le dépose là et puis basta ! Cet œuf est piriforme, c’est-à-dire qu’il est largement arrondi à une extrémité et pointu à l’autre. Cette forme lui permet de tourner en rond sur lui même, réduisant ainsi le risque de chutes s’il est malencontreusement bousculé (Source : Le comportement des oiseaux d’Europe, Armando Gariboldi et Andrea Ambrogio, La Salamandre, 2018). Le poussin, est semi-nidifuge. Il va donc quitter son nid avant d’être autonome et n’acquerra le vol que plusieurs semaines plus tard.
Le jeune quitte le nid pour rejoindre la mer – qu’il n’a encore vu qu’en carte postale – de manière assez brutale : par un saut dans le vide ! Mais son père le soutient et l’accompagne pour ce premier plongeon dans le grand bain.

Le pingouin torda est aussi un alcidé

Pingouin torda un alcidé de Bretagne
Pingouin Torda ©️ Morgane Cazes
Le numéro deux à pointer le bout de son bec est le pingouin torda (Alca torda) puisqu’il arrive près de nos côtes au mois de mars. Celui-ci ne fait pas plus de nid que le guillemot, il pond aussi sur une vire qu’il choisit généralement plus abritée, ou dans une cavité dans la falaise.
Le jeune est aussi semi-nidifuge et quitte le nid comme il peut, en dégringolant de sa falaise, parfois accompagné d’un parent.
A la différence du guillemot de Troïl, le pingouin torda est capable de transporter plusieurs poissons en même temps dans son bec. L’apprentissage de la pêche par le jeune est long, c’est pourquoi il reste dépendant de ses parents, le temps d’acquérir assez de technique pour être autonome.

Le pingouin torda est aussi un alcidé

Macareux moine, guillemots de troîl et pingouin torda, alcidés de Bretagne
Macareux moines avec un guillemot de Troïl et un pingouin torda ©️ Morgane Cazes
Le macareux moine (Fratercula arctica) quant à lui, est présent sur les sites de nidifications peu après le pingouin torda. Son nom lui vient de son costume noir et blanc sobre, tel un habit de moine (frater = frère, moine). Mais il se distingue de ses camarades par son bec très coloré, notamment à cette période.
Pour ramener les courses au nid, il ne fait pas dans la demie-mesure : il prend autant de poissons dans son bec qu’il le peut (jusqu’à une trentaine), principalement des lançons.
En ce qui concerne l’emplacement de son nid, il choisit de le creuser lui-même ou d’emprunter un terrier à un lapin de garenne ou à un puffin, sur une zone herbeuse. Notez qu’il arrive d’ailleurs que la galerie menant à son nid communique avec celle menant au nid d’un puffin (Source : Guide des oisillons et poussins des oiseaux d’Europe, Delachaux et Niestlé, 1989).
Le jeune macareux est lui nidicole, c’est-à-dire qu’il sera nourri par ses parents jusqu’à ce qu’il quitte le nid. C’est sans doute le plus « tanguy » des trois.

Les points commun de ces alcidés de Bretagne

Les jeunes des trois espèces d’alcidés garderont leur plumage juvénile durant 2 ans ne se seront en capacité de se reproduire à leur tour qu’à l’âge de 4 ans.
Tous ces alcidés de Bretagne sont présents et visibles, notamment sur l’archipel des 7 îles dans les Côtes-d’Armor, durant la période de reproduction et ce jusqu’à leur départ en migration après l’émancipation des jeunes.

Qu'est-il arrivé aux guillemots de Troïl ?

Pour approfondir le sujet des alcidés de Bretagne, nous vous conseillons l’épisode 13 de notre podcast « Minute Hérisson ! ». Dans cet épisode, nous menons l’enquête avec les enfants du centre de loisir de Crac’h pour identifier les causes de « l’hécatombe » des guillemots de Troïl, de février 2024.
Reproduction chez les alcidés de Bretagne